Lors de l’élection partielle du Bas-Rhin, le mouvement MaVoix se lance : pas de chef, toutes les décisions viennent de la base. Article de Marco Bresolin paru en une dans “La Stampa” (Italie), le 18 mai 2016.

Merci aux volontaires qui ont assuré la traduction : Sly, Maria et Damien.

“Le député, ce peut être vous” : lors de l’élection partielle du Bas-Rhin, le mouvement MaVoix se lance : pas de chef, toutes les décisions viennent de la base.

À 55 ans, Daniel Gerber a gardé la même passion pour les bandes dessinées que lorsqu’il était enfant. Il vit à Strasbourg grâce à son allocation chômage. Avant, il était libraire. Aujourd’hui, il cherche à devenir député de la République française. Il a pu poser sa candidature aux élections prévues dimanche dans le Bas-Rhin grâce à sa curiosité, mais surtout à une bonne dose de chance. Parce que le nom Gerber n’a pas été choisi au hasard. Mieux que cela : il a été tiré au sort.

Le test de dimanche (les élections [législatives] organisées ont pour but de remplacer un député démissionnaire) marquera le baptême électoral de #MaVoix, un collectif de citoyens qui, depuis l’été dernier s’est étendu à travers toute la France. Strasbourg, Lyon, Brest, Nancy, Nantes, jusqu’à Paris, où, depuis plusieurs semaines, le vent de la “Nuit Debout” souffle fort. Un vent de protestation qui, depuis la Place de la République, souhaite balayer le système des partis.

#MaVoix, littéralement «Ma voix» (mais en français «voix» signifie aussi vote), dénonce l’échec de la démocratie représentative et se fait le porte-parole “de ceux qui ne votent plus (l’abstention ne cesse de croître, ndlr), qui vote blanc, de ceux qui votent en se cachant les yeux et ne veulent pas signer de chèques en blanc aux partis “. L’objectif est clair: «Hacker l’Assemblée nationale” aux législatives de  2017. #MaVoix souhaite infiltrer l’Assemblée Nationale française grâce à des citoyens ordinaires qui devront simplement appuyer sur un bouton, en suivant les indications de la base. Un rêve de démocratie directe qui, en Italie, a donné l’impulsion au Mouvement 5 Etoiles. Les membres de MaVoix y croient : «Mettons que notre groupe parlementaire soit composé de 10 députés. Nous aurons une plate-forme en ligne où les inscrits pourront voter sur chaque proposition de loi : si 70% de nos militants votent oui, 20% votent non et 10% s’abstiennent, nos députés vont se répartir comme suit : 7 votent oui, 2 votent non et un s’abstient “, dit Adeline, parmi les promoteurs du collectif de Strasbourg, réunis hier dans un salon de thé à quelques pas de la gare.

S’il n’est pas difficile de trouver des points en commun avec le mouvement 5 Etoiles, il est facile d’identifier les principales différences. Une par dessus tout : l’absence de leadership. MaVoix n’a pas de Beppe Grillo qui remplit les rues avec des meetings aux allures de show, ce qui en fait vraiment un mouvement horizontal. Le choix des candidats par le tirage au sort et le comportement qu’ils devront avoir au Parlement transforme le slogan des “grillini” “l’un vaut l’un” à “l’un vaut l’autre”. Prenons Daniel Gerber, l’ancien libraire devenu candidat par tirage au sort (parmi les 18 candidats en herbe qui, comme lui, avaient fait un stage de formation sur les institutions françaises) : sur les affiches dans les rues de la capitale alsacienne, son visage n’apparait pas. MaVoix utilise des affiches particulières, qui valent à elles seules un quart des dépenses électorales (la campagne a coûté € 4000) : à la place des images habituelles de candidats, il y a un miroir. Ceux qui passent devant voient leur reflet, parfaite métaphore de ce que MaVoix voudrait faire : porter au Parlement la voix de ses électeurs. Sans médiations.

La philosophie est celle de Wikipédia : la participation et la responsabilité sont les mots-clés. Peut-être que Daniel échouera dimanche, il est encore tôt. Mais d’ici aux législatives de 2017, tout peut arriver et MaVoix a le mérite de s’approprier une question à laquelle un Parti Socialiste, aujourd’hui sans boussole, et une droite divisée ne savent donner de réponse. Et peut-être est-il temps également de s’inquiéter pour le Front national, qui, jusqu’à présent, se nourrissait des votes anti-système. Jusqu’à présent.